ISF, PMU, CQFD ! L´investissement dans les PME permet d´alléger la facture de l´impôt sur la fortune. Du coup, quand une société a pour objet d´acquérir des chevaux de course, la taxation du patrimoine sert à financer ce qui symbolise le mieux la richesse ! Il n´empêche que le montage est parfaitement légal. Il a reçu le visa de l´AMF.
Richard III est-il vraiment l´auteur de la phrase que lui prête Shakespeare ? Selon le dramaturge, le monarque était prêt à échanger son « royaume pour un cheval ». Mais il n´existe aucune preuve historique de cette formulation. Quant au fond de la pensée, elle ne serait pas glorieuse. Selon l´intrigue de la pièce, il s´agissait davantage de trouver un moyen de prendre la fuite que de manifester sa passion pour les équidés…
En 2010, il devient possible de satisfaire à la fois son amour des chevaux et son désir de s´Ã©chapper (d´une contrainte fiscale en l´occurrence). C´est le concept de Cheval Invest : il permet de réaliser une économie d´ISF, égale à 75 % de son investissement, tout en se rapprochant du monde enivrant des courses hippiques.
En 2008, au moment où la crise financière atteignait des sommets, un placement concret, bien éloigné des produits dérivés, faisait florès en France. Il consistait à se rendre acquéreur de vaches laitières. Deux ans plus tard, la crise des marchés obscurcit à nouveau l´horizon et les prairies servent toujours de cadre à l´investissement. Mais, cette fois, c´est pour y faire évoluer pouliches, poulinières, étalons, foals et yearlings.
L´objet de la jeune société réside dans l´achat de chevaux de course de galop. Le but est de les revendre dans un horizon de six à vingt-quatre mois. Non sans avoir engrangé entre-temps des plus-values. Du moins, c´est l´objectif avoué. En majorité, les investissements seront constitués de foals, c´est-à -dire des poulains âgés de huit à dix mois, destinés à être vendus l´année suivante sous forme de yearlings. Ces derniers, eux, seront achetés lors des ventes d´août à octobre et ils seront revendus au printemps suivant, prêts à être montés, une fois qu´ils auront atteint l´Ã¢ge de deux ans. Les poulinières et pouliches constitueront une autre part de l´investissement. Elles serviront à produire des foals et des yearlings. Enfin, une dernière partie sera consacrée à l´acquisition de parts d´Ã©talons en cours de syndication.
A l´origine du projet, une bande de férus d´Ã©quitation, doublés d´une expérience de financiers. Ainsi, Pascal Adda, le président du directoire, a obtenu neuf années de suite la cravache d´or des amateurs, mais, en même temps, il est titulaire d´une maîtrise de gestion décrochée à Paris Dauphine. Son adjoint, Gilles Trapenard, a passé vingt ans dans la banque avant de créer un haras dans l´Allier. Le conseil de surveillance ne déroge pas au principe de la casaque à double couleur : Philippe Jaeckin, ancien directeur général adjoint du groupe Danone, est propriétaire de plusieurs chevaux ; Pierre Vincent est un banquier spécialisé de longue date dans le financement des acteurs de l´hippisme… 3.000 euros par investisseur
Le montage conçu par ces protagonistes a reçu le 22 mars le visa de l´AMF (10-059). Il consiste en une augmentation de capital ouverte aux particuliers. L´offre court jusqu´au 2 juin. Le but est de parvenir à cette date à une levée de fonds de 3 millions d´euros, à raison d´une souscription minimale de 3.000 euros par investisseur. Les premiers à se manifester (par le biais du site Sicavonline.fr) seront les premiers servis. Il faudra parvenir à un minimum de 1 million de souscription, faute de quoi l´argent sera rendu aux investisseurs. Ce seuil à atteindre s´explique par la nécessité de pouvoir faire face à des besoins de liquidités.
C´est que les risques ne sont pas nuls dans cette affaire. La conjoncture est fragile. De nouveaux acteurs venus des Emirats, de Russie et d´Asie animent le marché, mais imaginons qu´ils fassent faux bond ! Et puis le meilleur pur-sang n´est pas à l´abri de contre-performances. Une épizootie peut aussi décimer toute l´Ã©curie. Enfin, le marché n´a rien de liquide. La dissolution de la société est prévue à l´Ã©chéance de sept ans écoulés. A cette date, les bénéfices seront partagés entre les souscripteurs.
Cependant, les promoteurs ont déclaré d´emblée qu´ils n´Ã©taient pas sûrs de pouvoir vendre les chevaux acquis dans les délais ou dans les prix souhaités. La mise de fonds initiale pourrait donc ne pas être intégralement restituée. Mais il restera l´Ã©conomie d´impôt. Un couple marié supportant l´ISF pour 15.000 euros pourra l´annuler entièrement s´il investit 20.000 euros d´ici au 15 juin (75 % 20.000). En outre, au cours des cinq prochaines années, il pourra déduire cet investissement de sa base taxable. Avis cependant aux amateurs ! Durant la période de détention obligatoire des parts (cinq ans au minimum), il est recommandé de prévoir une dépense supplémentaire : celle d´un abonnement à « Paris-Turf »… |