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L’ACADÉMIE ÉQUESTRE SUR LA SELLETTE
L’« affaire Bartabas » offre l’occasion de se pencher sur la réalité d’une école équestre unique au monde

C’est une «affaire» qui commence le 21 décembre dernier. Jean-François de Canchy, directeur de la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) à Paris, convoquait Bartabas, fondateur de Zingaro, mais aussi de l’Académie du spectacle équestre de Versailles, afin d’évoquer la situation financière préoccupante de cette dernière institution.

Cet été, un plan de « sauvetage » sur trois ans avait été mis au point, prévoyant une subvention de 350.000 € versés par les diverses collectivités et l’État, qui s’engageait lui-même à hauteur de 175.000 €. Or Jean-François de Canchy annonçait à Bartabas l’annulation de ce plan. Dans un subit mouvement de colère, Bartabas coupait court à la discussion, faisait voler les chaises, s’en prenait au mobilier.

Laissant le personnel de la Drac sous le choc, il regagnait la rue où, interpellé par la police, il était mis en garde à vue jusqu’au lendemain matin. Indignée à juste titre par cet acte « inqualifiable », Christine Albanel, ministre de la culture, précisait qu’une plainte avait été déposée et que la justice suivrait son cours. Ses services n’en déclaraient pas moins que l’annonce de la Drac était une erreur et que le plan de sauvetage était maintenu.

Une perte de 40% de son budget aurait signé la mort de l’Académie. Trois semaines après, Bartabas « justifie » toujours son attitude (« ce qui ne l’excuse pas », reconnaît-il) par ce malentendu « qui aurait signifié la mort de l’Académie avec une perte de 40 % de son budget ».

Quel est le statut et la réalité de la situation de cette Académie unique en France, voire dans le monde, qui se présente autant comme une école formant au dressage de haute école et à l’art équestre que comme une « école de vie » ?

Une « compagnie école ». « Les écuyers qui sont ici, ne sont pas pour moi de simples élèves, explique Bartabas. Ils arrivent avec 10 ou 15 ans d’équitation derrière eux. Ce sont des artistes qui se perfectionnent sans cesse, tout en se confrontant au public à travers la représentation. »

Outre des exercices équestres, ils suivent des cours de danse, d’escrime, de chant, d’arts plastiques, de « kyudo » (le tir à l’arc japonais). Il ne s’agit pas, cependant, de transformer les douze écuyers de l’Académie en spécialistes de tous ces domaines, mais de « développer leur sentiment artistique ».

L’idée directrice est celle de la « transmission », renouant avec l’esprit des ateliers de peintres d’autrefois, des Compagnons du Devoir ou, mieux, de l’école de danse créée jadis par Béjart. Les écuyers forment une sorte de corps de ballet équestre capable de se produire aussi bien sous la gouverne de Bartabas que sous celle d’autres chorégraphes – il rêve d’un spectacle avec Pina Bausch.

Entrés comme élèves, ils passent progressivement du statut de cavaliers confirmés à celui de titulaires («un peu comme les sociétaires de la Comédie-Française »). Ils peuvent rester sans limite au sein de l’Académie, formant à leur tour les nouveaux arrivants. Il n’y a pas de diplôme. Certains, notamment au ministère, s’en émeuvent. Pas Bartabas.

« Je veux bien faire comme les autres. Mais à quoi cela peut-il servir ? Les seuls diplômes qui existent dans le monde équestre sont ceux qui permettent de participer aux concours hippiques ou de devenir instructeurs. Moi, je forme des artistes. Il ne s’agit pas seulement de maîtriser une technique mais la relation qui unit un homme et un cheval. C’est sans fin. »

Un propos parfois difficile à admettre de la part des collectivités notamment lorsqu’elles sont appelées à la rescousse pour financer l’Académie, alors que Bartabas s’était engagé, à l’origine, à ce que cette dernière s’autofinance.

 

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